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La lettre d'Option Droit & Affaires

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Capital-risque : la fin de l’emballement

Publié le 1 février 2023 à 11h40

Coralie Bach    Temps de lecture 4 minutes

Si les investissements dans les start-up ont continué de croître sur le premier semestre 2022, ils ont ensuite marqué le pas témoignant d’une plus grande prudence de la part des fonds.

Après l’euphorie, l’accalmie. Longtemps parent pauvre du private equity, le marché du capital-risque a connu une envolée spectaculaire ces deux dernières années. Mais si les montants levés avaient plus que doublé entre 2020 et 2021, ils n’ont progressé « que » de 17 % en 2022, et ont même enregistré une baisse de 21 % sur le second semestre, par rapport à la même période en 2021. Selon la dernière édition du baromètre EY du capital-risque en France, 13,5 milliards d’euros ont ainsi été collectés par 735 sociétés tricolores en 2022.

Une activité tirée par de grosses opérations

Cette hausse en valeur s’explique notamment par la progression des gros tours de table ; les volumes ayant au contraire diminué de 6 %. Ainsi, les opérations de plus de 100 millions d’euros ont augmenté, passant de 22 à 29, pour un montant total levé de 6,2 milliards d’euros (contre un peu moins de 5 milliards en 2021). Ces méga-deals ont donné naissance à huit nouvelles licornes, portant le nombre de jeunes pousses valorisées plus d’un milliard d’euros à 27, alors qu’elles n’étaient que deux cinq ans plus tôt. Parmi les entrants dans ce club figurent Qonto (486 millions d’euros levés), Exotec Solutions (305 millions d’euros) et EcoVadis (478 millions d’euros), qui se placent par ailleurs dans le top cinq des plus grosses levées aux côtés de Back Market (450 millions d’euros) et de Contentsquare (393 millions d’euros).

La répartition sectorielle, quant à elle, évolue peu, avec une forte dominante des services internet et des logiciels, respectivement avec plus de 2,9 milliards d’euros d’investissements. L’étude relève toutefois « des dynamiques très différentes » : la valeur cumulée des transactions enregistrées par les services internet a en effet chuté de 24 %, tandis que celle des logiciels a progressé de 36 %. A noter par ailleurs une envolée des cleantech de plus 172 % pour atteindre 2,08 milliards d’euros levés, tandis que les fintechs ont collecté 2,3 milliards d’euros, en baisse de 8 %.

Retour aux fondamentaux

Anne-Charlotte Rivière, Goodwin

Mais au-delà des chiffres annuels, le baromètre d’EY témoigne surtout d’une contraction du marché. Avec 5 milliards d’euros levés, le second semestre s’est montré bien moins dynamique que le premier (8,4 milliards d’euros collectés). « Nous avons vu un retournement à partir de juin dernier, confirme Anne-Charlotte Rivière, associée chez Goodwin. Plusieurs sociétés ont négocié auprès de leurs investisseurs historiques des financements complémentaires, structurés généralement sous forme d’obligations convertibles. Il s’agit soit de participations fragilisées ayant besoin de trésorerie rapidement pour poursuivre leur activité, soit au contraire de start-up performantes qui préfèrent retarder leur levée de fonds en attendant un contexte économique plus porteur. »

Benjamin Cichostepski-Lesage, Orrick

Plus qu’une crise du capital-risque, la réduction du nombre de transactions semble surtout témoigner d’un retour aux fondamentaux. « Le ralentissement des levées assainit le marché, résume Benjamin Cichostepski-Lesage, associé chez Orrick. Les VCs ont parfois pu parier sur des projets pas assez solides. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. » Les éléments financiers sont plus que jamais au cœur de l’analyse des dossiers. « L’heure de l’hypercroissance est en train de laisser place à la sobriété des investissements mais surtout au retour en force de la profitabilité comme indicateur principal de performance », indique l’étude. Un avis partagé par Anne-Charlotte Rivière : « Les investisseurs demandent désormais des business plan qui permettent d’atteindre la rentabilité dans un délai raisonnable, relève-t-elle. Jusqu’à présent, l’accent était surtout mis sur la croissance et les gains de parts de marché. » Autre évolution notée, des séries B, C, ou D, qui prévoient moins de cash-out pour les fondateurs : « Poussés par la concurrence, les fonds proposaient régulièrement aux dirigeants de céder une partie de leur participation à l’occasion de la levée. Nous le voyons moins aujourd’hui », poursuit l’avocate.

Les généralités demeurent toutefois difficiles à tirer, le marché restant, aux dires des professionnels, très hétéroclite. « Les conditions des opérations varient beaucoup selon la maturité du projet, le secteur et évidemment l’expérience de l’équipe de management, souligne Benjamin Cichostepski-Lesage. Nous voyons des sociétés fragilisées, qui ont dû réduire leurs coûts et ne parviennent pas à se refinancer. Mais les meilleurs projets continuent de lever des fonds sans difficulté, et sur des niveaux de valorisation importants », conclut-il.


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