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Transmission d’entreprise : des cédants plus avisés et mieux préparés

Publié le 24 juin 2013 à 14h54    Mis à jour le 29 juin 2021 à 10h31

Fabrice Imbault

Par Fabrice Imbault, directeur général adjoint, A Plus Finance

La transmission d’entreprises ne connaît pas la crise ! Et même au plus fort des débats sur le projet de loi de finance, les opérations se sont poursuivies, notamment sur le segment des entreprises small caps, c’est-à-dire sur des valorisations inférieures à 50 millions d’euros. Pour le cédant, comme pour l’acquéreur, de nombreux paramètres doivent être pris en compte pour mener à bien ces opérations.

Un marché dynamique

Sur ce type de PME, l’’écosystème de la transmission est devenu progressivement plus fluide. Les entrepreneurs sont de plus en plus sensibilisés à la nécessité d’anticiper ces opérations pour éviter toute cassure qui serait dommageable à leur entreprise. Ils préparent leur sortie plus tôt qu’avant, avec un esprit plus ouvert. Souvent, une bonne connaissance de leur environnement leur permet d’identifier par eux-mêmes plusieurs repreneurs potentiels (famille, cadres présents dans la structure ou chez des concurrents) ou d’envisager des opérations de rapprochement. En termes d’intermédiation, plusieurs options sont à leur disposition. Les outils de mise en relation, tels que certains sites web ou les CCI, constituent une première possibilité. Mais les entrepreneurs peuvent également s’entourer de conseils, qui les accompagnent depuis leurs réflexions préliminaires jusqu’à la structuration de l’opération de transmission. Ils varient en fonction de la taille de la société : cabinet de conseil en transmission, experts-comptables pour les TPE, banques privées voire banque d’affaires pour les plus grosses sociétés. Néanmoins, il faut garder en tête que 22 % des sociétés de type TPE et PME disparaissent ou n’apparaissent pas sur le marché au moment de la transmission, en raison de faillites, fusions ou absorptions1.

Le financement des opérations est également devenu plus simple. Certes, les banques restent très prudentes, a fortiori lorsqu’elles regardent l’univers des PME. Au-delà des aléas inhérents à cette typologie de société, surtout dans un moment de changement, le mouvement de retrait des banques s’explique aussi par un pricing du risque PME traditionnellement faible en France. Le financement de ces entreprises étant moins profitables, les banques diminuent leur niveau d’intervention, notamment dans les opérations de transmission. Ce phénomène, en créant un nouveau besoin, a favorisé l’arrivée de nouveaux intervenants privés qui peuvent offrir des solutions de financement en dette et en capital. Ces fonds d’investissement, généralement spécialisés sur ce type de PME de petite taille, offre un service et une proximité qui fiabilisent les montages qui restent souvent complexes. En effet, la structuration financière d’une transmission d’entreprise n’est pas relative à la taille de l’entreprise.

L’entreprise, de génération en génération ?

Aujourd’hui, la dynamique du marché de la transmission s’explique par deux phénomènes propres. La première est l’effet générationnel de nombre de «baby-boomers entrepreneurs» qui arrivent à l’âge de transmettre l’entreprise qu’ils ont souvent créée plusieurs dizaines d’années auparavant. Alors que le schéma classique était la transmission familiale vers une nouvelle génération souvent présente dans l’entreprise depuis longtemps, les évolutions sociales ont fait éclater ce schéma. Du coup, une sorte de «marché de la reprise» s’est développée et beaucoup d’opérations se réalisent avec des repreneurs plus jeunes, venus souvent de mondes différents. Le phénomène est aussi alimenté par le fait que le départ à la retraite ne signifie plus la cessation d’activité. Au-delà de la reprise de l’existant, les cédants ont aussi en ligne de mire la croissance de leur entreprise. De ce fait, ils choisissent leur successeur sur la base de capacités de reprise d’une part mais surtout de compétences de développement. Pour preuve, les cas de plus en plus nombreux où une partie du produit de cession est réinvestie dans la holding de reprise.

Néanmoins, les belles transmissions familiales continuent d’exister sur des PME souvent porteuses de grands savoir-faire.

Citons notamment la cession de Sonomo, spécialiste des moules complexes pour l’industrie du verre basé à Givors, début 2013. Le fondateur José Garcia a transmis l’entreprise à ses trois enfants, déjà impliqués dans la gestion opérationnelle depuis plus de quinze ans. Ces derniers s’appuient sur une connaissance fine de la société et de ses clients et peuvent ainsi poursuivre l’aventure entrepreneuriale.

Priorité au développement

Le deuxième moteur de la transmission en France se trouve dans le nombre croissant de cédants plus jeunes, c’est-à-dire des entrepreneurs souhaitant transmettre leur entreprise bien avant l’âge de la retraite. Ceux-ci adoptent une vision plus large du potentiel de développement de leur entreprise, notamment face à un environnement mondialisé. Alors qu’ils ont mené leur activité à un stade de maturité avancé, ils ont conscience que la croissance de l’activité pour passer à une étape supérieure nécessite des mutations importantes en termes d’outil de production, de taille de marché ou même de gouvernance. De fait, ils préfèrent «passer la main» soit à des managers plus à même de porter l’entreprise vers d’autres cieux ou, dans le cadre de cessions industrielles, souvent à des grands groupes qui peuvent donner les moyens nécessaires au développement.

Dans ce contexte, on distingue deux types de profils de cédants. Le premier, celui du «serial entrepreneur», qui crée une société, la développe, la cède, pour se consacrer à un nouveau projet. Le second type, plus classique, est celui du dirigeant-actionnaire qui se rend compte que son entreprise a besoin de ressources nouvelles pour assurer sa croissance. Ce sont souvent des opérations structurées sous forme de Bimbo (buy-in management buy-out), où le cédant réinvestit une part importante du produit de cession dans la holding de tête. Le cédant reste ainsi impliqué en tant qu’actionnaire minoritaire, ce qui permet au repreneur de continuer à bénéficier de son savoir-faire et de son expertise, tout en rassurant les clients et partenaires sur la transition. C’est ainsi que s’est passée, début 2013, la transmission de la société Verandaline, le leader en Bretagne de la véranda haut de gamme. Pour permettre son développement à l’international, la famille fondatrice s’est associée à Francis Leduc, l’ex-dirigeant de Ricoh Information System, par une opération de Bimbo. Francis Leduc est ainsi devenu l’actionnaire principal, aux côtés de la famille cédante qui reste opérationnelle et actionnaire. Ceci témoigne de la confiance de la famille fondatrice dans le potentiel de la société et dans l’impulsion donnée par un repreneur choisi pour faire croître Verandaline.

Le nombre croissant de ce type d’opérations montre aussi que la vision entrepreneuriale en France gagne en maturité et profite à la fluidité des transactions capitalistiques sur les PME. Au-delà de la dynamique sur le marché spécifique de la transmission, cela est surtout très positif pour la croissance future de nos entreprises.

1. Observatoire CRA de la transmission des TPE-PME, édition 2013.

3 questions à Fabrice Imbault, directeur général adjoint, A Plus Finance

Quelles sont les problématiques actuelles du marché ?

Le marché souffre aujourd’hui de difficultés au niveau du financement, notamment sur le segment des entreprises de petite taille, valorisées moins de 50 millions d’euros. Ces sociétés présentent un risque que les banques estiment très élevé, et sont au-dessous de la taille critique que recherchent les acteurs «classiques» du LBO. Elles demandent, au-delà du financement, un travail d’accompagnement et de structuration que seule une équipe dédiée et expérimentée est capable de proposer. Peu d’acteurs disposent des ressources nécessaires pour traiter ces opérations. A Plus Finance s’appuie sur une connaissance historique du tissu des PME françaises et se positionne comme l’un des rares experts de cette typologie d’entreprises. Nous les connaissons bien et sommes à même de leur proposer des solutions adaptées à leur situation.

Comment accompagnez-vous les entrepreneurs dans la transmission ?

A Plus Finance possède toute une gamme de fonds de dettes privées dédiés aux small caps, qui permettent de financer toutes les étapes de leur développement : du financement du développement, aux opérations de croissance externe et de transmission. Depuis deux ans, le deal flow en opérations de transmissions small cap est assez important pour avoir un premier fonds dédié à cette stratégie d’investissement. Un deuxième est même en cours de levée. Ces fonds offrent un financement dit sponsorless, en capital et en dette. Cela permet de proposer aux repreneurs une offre originale et packagée qui peut couvrir la majeure partie de leurs besoins de financement. Le fait d’intervenir à la fois dans la structure capitalistique et dans la dette donne également plus de souplesse sur les conditions financières de l’opération et permet de traiter le dossier avec plus de réactivité.

Quelles sont les particularités de vos équipes dédiées ?

Nous développons depuis quatre ans notre activité de dette. Au sein de notre équipe de gestion, qui compte huit personnes, quatre collaborateurs travaillent sur les problématiques de dette et de transmission. L’équipe est constituée de profils expérimentés très complémentaires, aux compétences assez variées pour traiter l’ensemble des situations rencontrées. Cette équipe est très soudée, très cohérente, ce qui lui permet de travailler de façon collective. Grâce à ce travail, nous sommes en mesure de générer et de traiter un deal flow de qualité, ce qui est souvent le gage du succès dans l’investissement.

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