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Les exigences accrues de conformité pesant sur les entreprises soulèvent de nouveaux défis en arbitrage international. Il arrive en effet désormais fréquemment qu’une partie invoque des soupçons d’infractions pénales devant les arbitres pour justifier la résiliation du contrat avec son partenaire commercial. Entre leur obligation de compliance et le risque de contentieux arbitral associé à la résiliation d’un contrat sur la base de simples soupçons, les entreprises se trouvent dans une position extrêmement délicate. Celle des arbitres ne l’est pas moins. Gardiens de l’intégrité de l’arbitrage, ils doivent désormais se prononcer sur l’existence d’infractions (pénales) pour assurer la conformité de leur sentence à l’ordre public international, sans pour autant outrepasser leur mission (civile). Un jeu d’équilibriste périlleux. La tâche des avocats n’est pas simple non plus puisqu’ils doivent apporter (en demande) des éléments de preuve – par nature indirects – de nature à conforter les soupçons, ou (en défense) ceux – par nature inversés – démontrant la bonne foi. Ils sont obligés de collaborer à cette fin avec des pénalistes et des enquêteurs ce qui fait que le temps et le coût de l’arbitrage augmentent.
Mais tel est le défi au vu du renforcement du contrôle des sentences se prononçant sur des infractions pénales par le juge de l’annulation français, depuis ses décisions Belokon et Sorelec. La méthode du « faisceau d’indices précis, graves et concordants » utilisée désormais pour vérifier l’existence de telles infractions et la possibilité d’évaluer de nouvelles pièces produites devant lui, marque un tournant dans l’histoire du contrôle de la conformité des sentences à l’ordre public international, par le juge français.
Conscientes de ces problématiques, les institutions arbitrales publient diverses lignes directrices (« red flags ») en vue d’aider les entreprises et les arbitres à identifier si un partenaire commercial risque d’être impliqué dans des activités illicites.
Il reste que le nouveau contrôle – quasi au fond – de ces sentences par la cour d’appel de Paris interroge sur le maintien de l’attractivité de Paris comme place d’arbitrage international.