La fiscalité est un facteur clé pour la gestion des actifs immobiliers. Au cours de ces dix dernières années, les acteurs de l’investissement et de la gestion d’actif ont été renforcés par les régimes SIIC et OPCI qui leur permettent de gérer plus de 135 milliards d’euros d’immeubles. Parallèlement, la pression fiscale n’a jamais été aussi forte sur les entreprises. Les auteurs reviennent sur ce paradoxe et ses enseignements pour les acteurs de l’immobilier.
Sur le plan fiscal, le contexte a évolué mais de manière assez nuancée au cours des dernières années
Un grand virage a consisté dans la fin du régime de faveur qui permettait, aux termes de l’article 210 E du code général des impôts, à une société d’investissement immobilier cotée (SIIC) ou un organisme de placement collectif en immobilier (OPCI) d’offrir à son vendeur un taux d’imposition de sa plus-value immobilière de 19% contre 34,43% en temps normal. Le régime s’est arrêté et force est de constater que depuis, les SIIC ont marqué un peu le pas, concurrencées par tous les autres investisseurs et notamment les fonds d’investissement sur un marché relativement atone de l’offre. Leur régime reste toutefois attractif et si on en juge par les dernières opérations réalisées sur le capital de SFL, Colonial et Klépierre ou encore la récente annonce de Realia de la cession de sa participation dans SIIC de Paris au profit d’Eurosic, elles gardent une vraie attractivité pour les investisseurs français et étrangers. On devrait donc encore voir des opérations de marché intéressantes dans ce domaine et notamment des opérations de concentration.
Pour les OPCI, là aussi, ils ont profité d’une dynamique propre à leur régime avec une souplesse accrue en termes d’actionnariat. En effet, c’est un véhicule qui s’est avéré très intéressant à utiliser tant pour les investisseurs institutionnels (assureurs) français que pour des fonds étrangers. Avec une gouvernance bien organisée, ce véhicule a permis de structurer un bon nombre de clubs deals. Par ailleurs, dans un environnement où les pouvoirs publics tentent de lutter contre l’érosion des bases fiscales, en limitant par exemple l’effet de levier fiscal lié à la dette ou les capacités d’amortissement ou de déduction des pertes fiscales, utiliser un véhicule exonéré devient très compétitif surtout si les coûts de gestion baissent fortement comme c’est le cas actuellement. L’OPCI s’est donc imposé sur le marché en quelques années. On estime que les actifs sous gestion d’OPCI représentent une somme supérieure à 35 milliards. Il fait l’objet d’un marché secondaire qui devrait être de plus en plus actif.
Toutefois, l’arbre ne doit pas cacher la forêt et certaines menaces pèsent encore sur le marché
Le contexte fiscal n’est qu’un facteur retenu par les opérateurs dans leur appréciation du couple attractivité/risque pays. En témoigne cette récente étude de PwC sur l’attractivité des villes dans le monde. Paris passe de la 4ème à la 6ème place au rang mondial (Paris occupe la deuxième place européenne). Selon l’auteur, en termes de puissance économique, Paris passe de la 2ème à la 4ème place en raison notamment des charges qui pèsent sur les entreprises et de la faible croissance du PIB. La fiscalité ne peut dont suppléer une situation économique très contrastée en France. Il y aura reprise mais celle-ci consommera-t-elle des m2 supplémentaires au travers de nouveaux emplois pour que l’immobilier s’équilibre entre développement et investissement ?
Si l’arsenal juridique et fiscal ne peut pas créer un besoin, il est impératif qu’il accompagne son développement à tout le moins. Dans le domaine du logement et sans parler des normes de construction, le recours à l’investissement privé est indispensable. Il faut l’inciter par de véritables encouragements et non pas par des demi-mesures qui ne satisfont personnes. Il faut également être innovant dans les méthodes de financement et favoriser les partenariats public/privé.
L’attrait pour l’investissement immobilier reste toutefois important et solide dans ce contexte de crise, mais il y a des facteurs de risques importants dans le domaine international. Comment les outils SIIC ou OPCI évolueront avec le temps ? L’instabilité de la politique fiscale française n’a pas que des défauts, car elle a impliqué aussi une forme de statu quo aussi bien dans le domaine des négociations fiscales bilatérales (conventions fiscales) que multilatérales (au niveau Européen). Mais, revers de la médaille, le manque de visibilité dans ce domaine ne permet pas aux investisseurs d’avoir une stratégie fiscale à long terme.
En conclusion, si l’immobilier n’a pas connu d’évolution majeure sur le plan fiscal depuis la crise financière de 2008, il reste connecté à son environnement économique qui s’est dégradé. Avec chance, il en sortira épargné à l’heure où les pouvoirs publics recommencent à communiquer sur l’attractivité [fiscale] de la France.
Questions à…François Lugand et Franck Llinas, avocats associés, Arsene Taxand
Quelles sont les particularités de votre équipe dédiée à ces dossiers ?
Arsene Taxand revendique aussi dans l’immobilier son statut unique sur le marché de «One-Stop tax firm». Nous devons pouvoir répondre à toutes les attentes que nos clients peuvent avoir en matière fiscale dans le domaine de l’immobilier. Que ce soit des investisseurs à court ou long terme (fonds, SIIC, OPCI) professionnels de l’immobilier, des entreprises utilisatrices où qui ont développé une approche patrimoniale, des promoteurs, voire des personnes physiques qui ont souhaité diversifier leurs investissements.
Nous traitons aussi bien d’immobilier de bureaux, que commercial, résidentiel voire même industriels.Nous devons également travailler en parfaite coordination avec les équipes juridiques impliquées (service juridique, notaires, avocats) afin que notre compétence soit mise au service du projet et qu’elle soit force de propositions.Notre équipe est organisée autour de 2 associés, François Lugand et Franck Llinas. Elle rassemble un noyau dur d’hyper spécialistes de l’immobilier, mais aussi elle exploite toute la profondeur des ressources fiscales du cabinet, que ce soit en matière de M&A, de contentieux, de prix de transfert, de TVA immobilière ou de droit d’enregistrement, etc.
Notre équipe anime régulièrement des conférences sur des sujets d’actualités soit à l’attention de l’ensemble de nos clients soit sur des sujets choisis par nos clients ou par des associations de la profession, elle rédige également des tax alert et des sujets de fond dans la presse spécialisée.Enfin, et c’est son troisième pilier, l’essentiel du développement de notre équipe s’est basé sur notre firme mondiale, Taxand, qui rassemble des équipes fiscales immobilières dans tous les principaux pays, et notamment dans la zone euro qui est aujourd’hui un axe majeur d’investissement pour nos clients.
Nos équipes maîtrisent la fiscalité de la plus part des pays européens et elles sont donc capables de se projeter très rapidement en dehors du marché parisien. Nous avons pu ainsi récemment assister Klépierre lors de son opération de vente de centres commerciaux à Carrefour dans trois pays différents. Notre environnement fiscal est donc profondément international en raison de la nationalité de nos clients et de la localisation de leur projet.
François Lugand
François Lugand, avocat, titulaire d’un Magistère de Juriste d’affaires (Paris II Assas), d’un DESS en droit des Affaires et Fiscalité (Paris II Assas) et d’un DESS de fiscalité des entreprises (Dauphine), il débute sa carrière en 1992 chez Monassier & Associés. En 1994, il intègre Arthur Andersen International puis Clifford Chance en 1997. En 2001, il est admis aux fonctions de Notaire et intègre le réseau groupe Monassier Patrimoine & Entreprise, tout en gardant une activité de conseil en fiscalité immobilière auprès du Cabinet Anderden Legal. En juillet 2002, il rejoint le Cabinet Deloitte & Touche Juridique et Fiscal. Il rejoint Arsene Taxand en 2005 où il co-dirige le département immobilier.Franck Llinas est associé chez Arsene Taxand (2011) dans le département immobilier. Il est membre actif du département International Real Estate Services du réseau Taxand.
Franck Llinas
Franck Llinas a débuté sa carrière en 2000 chez Arthur Andersen International (2000/2002) puis a continué chez Taj (Deloitte & Touche) jusqu’en 2005 avant de rejoindre Arsene Taxand. Son activité concerne la fiscalité d’entreprise avec une expérience étendue dans le domaine immobilier et notamment en transaction immobilière. Grâce à sa collaboration au sein de cabinets internationaux, il a pu développer son expérience immobilière dans un environnement national et international.