Le marché français et européen des IPO a retrouvé des couleurs depuis bientôt deux ans. Alors que la crise des subprimes avait conduit les candidats à la cotation à reporter sine die leurs opérations, plusieurs introductions en bourse d’envergure ont eu lieu ces 18 derniers mois, à l’image d’Elis, Spie, Coface ou encore Europcar en France, aux côtés de plus petites IPO de biotechs et medtechs. Au total, 31 milliards d’euros ont été levés au premier semestre 2015 en Europe et la tendance est restée soutenue au second. L’échec de Deezer, d’Oberthur Technologies et les débuts mitigés de Showroomprivé ont néanmoins récemment cassé la dynamique. Bilan des dernières tendances observées en matière d’IPO par quelques experts du secteur.
Etat des lieux du marché
Philippe Kubisa, associé, Capital Markets & Accounting Advisory Services, PwC : PwC publie chaque trimestre un IPO Watch qui fait le point sur le marché au niveau européen et qui propose également une étude au niveau des Etats-Unis et de l’Asie. Il en ressort que le volume au Q3 a été relativement limité notamment en raison de la crise asiatique du mois d’août ; cette crise ayant entraîné une forte volatilité sur les marchés. Si Q3 est toujours un trimestre relativement calme, nous attendions Q4 avec impatience, notamment pour voir si serait atteint le cap des 50 milliards levés l’année dernière à la même période. Deux tendances sont aujourd’hui contradictoires : un pipeline assez important avec Amundi qui est potentiellement une introduction importante, mais un marché très volatil et des investisseurs exigeants. Les échecs de Deezer et d’Oberthur sont de parfaites illustrations de ce climat.
Marc Lefèvre, directeur Listing Europe, Euronext : Le marché s’est rouvert à la fin de l’année 2013. Etaient introduites des grandes capitalisations ou des PME, mais il manquait jusqu’à présent de véritables midcaps. Showroomprivé en est un beau symbole. Des opérations similaires sont également annoncées sur nos autres marchés en Europe et sont la preuve que notre écosystème peut attirer à nouveau ces sociétés. Ce sont des tests importants pour nos marchés. Dans ce nouveau cycle, l’environnement est soutenu par plusieurs éléments : le retour de la confiance des marchés et le rebond des indices, des liquidités considérables, un appétit pour le risque à la fois de la part des investisseurs institutionnels mais également des particuliers – 27 % des actions proposées par les PME/ETI sont achetées par des particuliers – une volatilité relativement mesurée, un assouplissement quantitatif de la BCE mais également une activité M&A soutenue. 2015 sera une année de référence et 2016 s’annonce également très intéressante.
Luis Vaz-Pinto, Deputy Global Head of Corporate Finance, Global Head of Equity Capital Markets, Société Générale Corporate & Investment Banking : Ma vision est un peu différente. L’année va être très belle pour les IPO en France, après 2014 qui avait été déjà très active grâce aux sorties successives d’émetteurs. On a même vu des IPO françaises en février alors qu’historiquement c’est plutôt le marché russe qui est actif en début d’année.
Le panorama européen demeure néanmoins plutôt négatif à cause de la volatilité observée sur les marchés. Les chiffres d’IPO s’établissent à moins 21 % depuis le début de l’année, par rapport à 2014. Et je vois mal l’Europe combler son retard d’ici la fin de l’année. Le problème n’est pas uniquement européen. Les statistiques américaines sont à moins 59 % alors que l’économie se porte bien mieux. 75 % des IPO US qui ont eu lieu au mois d’octobre ont été pricées sous la fourchette de sortie et aucune n’a pricé au-dessus. Une telle situation n’avait pas été observée depuis novembre 2012.
Cette volatilité a impacté les investisseurs qui se concentrent sur leurs portefeuilles existants. Si les IPO sont généralement considérées comme une source de performance dans un portefeuille, elles sont également une source additionnelle de risque et nécessitent tout un travail d’étude qui prend du temps. En général, l’investisseur va en outre choisir de se concentrer sur les plus grandes IPO car les plus petites auront peu d’impact sur la performance de son portefeuille. S’il gère 50 milliards, il est clair qu’une IPO de 100 millions ne va pas l’intéresser autant que celle qui est annoncée à plus d’un milliard.
Du côté des émetteurs cette volatilité a créé beaucoup d’incertitudes sur le lancement de leurs opérations. Ceci est dû à la structure des IPO, où généralement nous nous trouvons dans un schéma 2 + 2. Les notes de recherches sont déposées, les investisseurs partent faire du marketing pendant deux semaines, puis une fourchette de prix est communiquée et le management entame un roadshow pendant deux semaines. Le vendeur doit donc prendre la décision quasiment un mois avant de se lancer, sans savoir quelles seront les conditions de marché. C’est un problème d’autant plus en Europe où le changement des fourchettes de prix est assez problématique par rapport aux Etats-Unis.
Eric Schaefer, directeur d’Eurazeo Capital : Je suis un peu surpris que l’on puisse raisonner en volume ou en valeur d’une année sur l’autre. Fondamentalement depuis que le marché s’est rouvert, ce sont surtout des opérations de destockage qui ont été vues. En régime stabilisé et en dehors de ces effets de cycles, la question la plus intéressante est de savoir quel est le nombre d’entreprises que l’on parvient à amener sur le marché.
Préparer l’opération très en amont
Hervé Letréguilly, Associé, Shearman & Sterling : Nous constatons une très grande sensibilité à la volatilité, qui se retrouve dans toute la gestion du processus. Elle crée beaucoup de tensions durant le traitement de l’opération d’introduction : il faut tout d’abord accélérer le processus pour bénéficier des fenêtres de marché, et la possibilité récente de tenir plus en amont les réunions d’analystes du syndicat bancaire va dans le bon sens. Il est aussi nécessaire de tester le marché en présentant la société à des investisseurs de plus en plus tôt («early look»), pour évaluer leur intérêt en fonction de leurs réactions, ce qui permet d’affiner l’«equity story». Enfin, la volatilité conduit à trouver des investisseurs prêts à s’engager en amont afin de sécuriser l’opération. En effet, il est de plus en plus fréquent de chercher à obtenir d’investisseurs qu’ils acquièrent des titres pré-IPO («anchor investors») ou qu’ils s’engagent à l’avance à passer un ordre dans le livre d’ordres («cornerstone investors») pour pouvoir lancer l’opération. Cette tendance se constate sur des opérations de toutes tailles : lors de l’introduction en bourse d’Euronext, à côté du noyau dur d’actionnaires de référence constitué plusieurs semaines avant le lancement, des investisseurs se sont engagés pré-IPO à acquérir des titres au prix d’introduction. Cette approche se retrouve lors d’opérations de taille moins importante : ainsi, plusieurs sociétés de biotechnologies ont bénéficié de l’engagement de Bpifrance d’acquérir des titres lors de l’introduction. Cela nécessite d’être en mesure de fournir des informations à ces investisseurs très tôt dans le processus, ce qui implique une préparation avancée des comptes et du prospectus : l’information fournie doit être suffisamment fiable pour être communiquée.
Matthieu Grollemund, associé, Dechert LLP : Le travail en amont des introductions est en effet devenu considérable et déterminant dans le succès de l’opération. Au-delà de la structuration de la société (organisation, reporting, compliance, etc.), de l’éventuel recrutement d’un CFO capable de porter le projet, la constitution d’un noyau dur d’actionnaires à même de porter le projet est devenue un enjeu majeur, notamment en vue d’une cotation sur un marché étranger. Nous intervenons fréquemment sur des opérations, dites de «cross over», dans lesquelles des émetteurs effectuent des placements auprès d’investisseurs américains dans la perspective d’une cotation future et afin de sécuriser une partie du book et assurer le plus possible le succès de l’opération.
Caroline Parot, membre du directoire et directeur général finances, Europcar : La préparation en amont est liée au processus lui-même mais elle a aussi pour vertu de préparer la société à d’autres sujets que l’IPO elle-même. Europcar était sous LBO d’Eurazeo depuis plusieurs années et n’avait jamais été cotée. Or la préparation n’est pas forcément intuitive pour l’équipe de management. Cette période n’a pas été vécue comme longue, elle a été essentielle pour réaffirmer ce sur quoi le management croyait car il ne faut pas approcher le marché sans avoir fait sa propre introspection. Ces pré-roadshows auprès d’investisseurs nous ont ainsi fait évoluer sur la façon dont on doit appréhender la présentation de notre propre dossier dans un marché mondial. Car même si notre société est cotée à Paris, les investisseurs sont français, anglais, américains, ou du Moyen-Orient et peuvent avoir des logiques différentes de business model. Il a été intéressant pour nous de comprendre comment vendre l’entreprise et son histoire à des investisseurs qui nous jugent au regard de la compétition mondiale. Nous avons pu rasseoir les forces de l’entreprise et notre proposition.
Europcar a été introduit la dernière semaine de juin, c’est-à-dire juste avant la crise grecque. L’important était de sortir car nous étions persuadés que l’IPO aurait un effet positif pour notre histoire future. Au final, la volatilité a surtout été gérée par l’actionnaire au niveau du pricing de l’opération.
Eric Schaefer : En début d’année, nous avons également introduit Elis dans un contexte de volatilité important. Cette volatilité affecte aussi les poches de liquidité, notamment de la part des investisseurs américains. La poche d’investisseurs continentaux est aujourd’hui trop faible, notamment des investisseurs français, même s’ils ont pris une bonne part dans les opérations récentes. Personne ne peut aujourd’hui placer une mid cap uniquement sur des investisseurs français. La plupart des opérations qui se sont très bien placées ont été faites durant des phases où les investisseurs américains répondaient présents.
Je suis en outre surpris par la faible part des investisseurs retail. Dans le passé, Eurazeo a introduit Rexel, qui a bénéficié d’une part très importante d’investisseurs retail. Tel n’a pas été le cas pour Europcar.
Assurer le succès d’une opération
Luis Vaz-Pinto : J’ai recensé 18 échecs depuis le début de l’année en Europe. Il y en a 5 dans le domaine de la santé, 4 en énergies renouvelables, et la plupart sont plutôt de taille moyenne. La volatilité actuelle implique que les investisseurs n’ont pas le temps de tout analyser. Très rapidement, lorsque des entreprises n’ont pas un business plan, une equity story solide, le dossier n’est pas retenu.
Hervé Letréguilly : Nous voyons souvent une conjonction de facteurs. Pour Labco par exemple, il y a d’abord eu un effet volatilité, avec une chute de 6 % des marchés la semaine précédant le pricing et jusqu’à 1,5 % le jour même. Labco a par ailleurs une activité et un marché assez complexes à présenter aux investisseurs. Il y a également le facteur prix : l’opération se serait-elle mieux passée si la fourchette de prix avait été plus basse ? Il est toujours facile de le soutenir après coup. Il n’y a donc pas eu de facteur déterminant, mais une série de difficultés qui, avec la volatilité, suffisent à faire échouer une opération. L’opération serait peut-être passée le mois suivant et les fonds auraient pu en retirer davantage. A bien des égards, une IPO est une opération censée s’inscrire dans la durée : longue dans sa préparation, elle conditionne l’avenir de la société. Toutefois, elle reste à la merci de circonstances intervenant au moment du pricing : si le marché est difficile, si le secteur est en baisse, si un des «comparables» sort une mauvaise nouvelle, les investisseurs retirent leurs ordres.
Marc Lefèvre : De par son positionnement, Labco devait faire face à des contraintes particulières imposées par l’AMF sur sa capacité à vendre ou non les actions à tout type d’investisseur. L’equity story était elle-même contrainte. Mais il est vrai qu’aujourd’hui, les investisseurs sont beaucoup plus sélectifs. Il est donc essentiel de vendre une equity story séduisante.
Seela Apaya-Gadabaya, avocat, Sullivan & Cromwell : Labco était en effet soumise à un environnement réglementaire contraignant relatif notamment à la détention du capital des sociétés d’exercice libéral exploitant des laboratoires de biologie médicale. Ce contexte réglementaire spécifique et complexe avait rendu nécessaire une analyse juridique très poussée et avait conduit à l’insertion de développements détaillés sur ces sujets, notamment des facteurs de risques spécifiques, dans le prospectus relatif à l’IPO envisagée.
Philippe Kubisa :Les investisseurs sont globaux. Ils ont le choix, non pas entre les différentes opérations à Paris, mais entre toutes les opérations dans le monde, et ils se déportent assez vite.
Thomas Le Vert, associé, White & Case : Les évolutions des marchés nationaux des IPO sont d’ailleurs étroitement liées ; ainsi la rentrée de septembre 2014, où nous avions enregistré le document de base d’Elis et lancé simultanément l’opération Spie, a connu une fermeture du marché français – avec un report de ces deux opérations – à la suite notamment des résultats décevants de deux IPO en Allemagne. Le marché français ne s’est rouvert que quatre mois plus tard avec le lancement de l’IPO d’Elis.
Eric Schaefer : Au-delà de toute la technicité d’une IPO, il y a aussi le travail de préparation de l’histoire de l’émetteur. Le succès d’une IPO est le succès d’un marketing d’une histoire solide. Il faut vendre des faits davantage qu’un business plan ou de grandes théories comme on le voit dans certaines situations. L’investisseur s’intéresse aux faits, il a besoin de comprendre et de voir le détail. Eurazeo, en tant qu’investisseur en private equity, regarde un dossier pendant plusieurs mois de manière extrêmement détaillée et à la fin, essaie de fixer un prix. Un investisseur en bourse peut mettre des tickets très importants avec seulement un book et en ayant vu le management trois fois. Quand le management va le voir, l’histoire doit donc être corroborée par des faits faciles à comprendre et extrêmement solides. Tout le travail en amont de la construction du marketing, c’est un retour aux fondamentaux sur le métier. Comment expliquer le métier et l’histoire de la société de la manière la plus claire et la plus solide possible pour que l’investisseur les juge crédibles ? Il existe des histoires dont les investisseurs ne veulent pas. La profondeur du marché ne permet pas de fixer un prix à tout. Les raisons sont souvent liées à l’histoire du dossier, mais aussi parfois à la maturité du business. Il y a également des thèmes que les investisseurs aiment ou non, comme les pays émergents par exemple. Pendant un certain temps, le Brésil et l’Asie étaient formidables, mais sont regardés avec plus de prudence aujourd’hui.
Caroline Parot : Lorsque nous faisons les roadshows préalables au lancement de l’opération, nous n’avons pas notre document de base de trois cents pages qui raconte toute l’histoire de la société. Tout repose sur la simplification de la présentation de notre dossier qui doit en moins d’une heure être réalisée de manière percutante. Dans la préparation de notre IPO, nous avons analysé ce qui faisait l’essentiel et la substance de l’actif que nous proposions au marché. Car si le fonds met un actif sur le marché, il y a aussi le management qui croit à la valeur du business model de son entreprise. Nous vendons donc une histoire, mais aussi un track record, un marché sur lequel nous opérons et une perspective de développement. Pour Europcar, nous avons deux comparables aux Etats-Unis et un semi-comparable en Europe. Il existe donc en tout quatre sociétés cotées sur ce secteur de la location de voiture. Les investisseurs ne connaissent pas tous les dossiers donc il s’agissait d’expliquer le b.a.-ba. Pourquoi notre marché est-il solide ? Pourquoi est-il en croissance ? Pourquoi, dans ce marché, notre société a-t-elle une plus grande pertinence ? Quelles sont ses forces et ses faiblesses ? Il faut donc réfléchir aux messages à faire passer et les expliquer à un investisseur en une heure avant de revenir six semaines plus tard pour savoir quel ticket il compte investir. Le document de référence arrive très tard par rapport à l’ensemble du processus. Il faut donc en amont se reposer sur des faits les plus marquants. La présentation aux analystes est également importante pour la couverture de la valeur.
Luis Vaz-Pinto : Vous venez, Eric et Caroline, de décrire une best practice. Malheureusement toutes les sociétés ne sont pas aussi préparées. La Société Générale est numéro 1 en ECM en France depuis six ans et fait donc beaucoup d’opérations. Mais elle refuse également beaucoup de dossiers, qui justement n’ont pas le niveau de préparation dont vous parlez.
Caroline Parot : Nous étions préparés, mais nous avions aussi un très beau sous-jacent. Les fondamentaux de la société avaient fortement été travaillés avec Eurazeo, et ce depuis des années. Pour se coter, il faut préparer l’actif avant de le vendre.
Eric Schaefer : C’est en effet une question de maturité. Si nous avions voulu coter Europcar un an plus tôt, nous n’aurions sans doute pas réussi.
Luis Vaz-Pinto : S’il n’y a pas eu d’opérations en France en 2012, c’est justement parce qu’en termes de cycle, les sociétés qui étaient détenues par les fonds de private equity n’étaient pas prêtes. Elles ont commencé à regarder fin 2012, mais le marché n’était pas là. Il s’est ouvert en 2013, avec trois IPO, puis davantage en 2014.
Un marché porté par les sorties de LBO
Thomas Le Vert : Le marché est en effet porté par les sorties de LBO. Face à des fenêtres de marché de plus en plus réduites et à un calendrier d’introduction en bourse très serré, les sociétés détenues par des fonds d’investissement sont souvent assez outillées pour se lancer dans une telle opération. Notamment parce qu’elles ont souvent précédemment émis des emprunts obligataires high yield et sont donc déjà familières avec les mécaniques d’une opération de marché que sont la préparation de la rédaction d’un prospectus, les rencontres avec les investisseurs, les obligations de reporting, etc. Elles sont donc capables de tenir des délais brefs. La tâche est plus difficile pour des sociétés plus traditionnelles. C’est pourquoi dans les opérations de plus de 500 millions d’euros à Paris, au cours des trois dernières années, plus des deux tiers correspondent à des opérations initiées par des fonds d’investissement. On citera par exemple les opérations Spie, Europcar ou encore Elior.
Marc Lefèvre : Le stock de LBO à sortir est très important et représente des centaines d’opérations chaque année. Le pipeline qui est d’ores et déjà intéressant pour 2016 sera alimenté par des sorties de fonds en bourse mais également par des opérations cross border.
Thomas Le Vert : Avec un petit écueil : pour l’instant ce sont les sociétés sous LBO de taille significative qui se sont introduites en bourse, et se présentent désormais des sociétés de taille un peu moins importante. Ces opérations devront faire face à un marché du M&A actif et donc à de possibles dual tracks.
Seela Apaya-Gadabaya : J’ajoute que sur ce type de sociétés de taille plus modeste, la phase de préparation de l’émetteur à sa cotation peut devoir être allongée lorsque cela est possible car les équipes présentes chez les émetteurs concernés sont moins structurées et moins préparées. La préparation de l’IPO étant souvent pour elles l’occasion de rationaliser certains processus, de créer certaines fonctions au sein de l’entreprise ou de les étoffer. Lorsqu’il ne s’agit pas d’une sortie de fonds préparée très en amont, les calendriers d’opération serrés s’avèrent être relativement difficiles à tenir.
Eric Schaefer : Ces sociétés plus petites n’ont pas non plus la même typologie d’investisseurs. Le commentaire que je faisais sur le besoin d’aller chercher une poche plus américaine, change un peu. Cela pose la question des poches de liquidité que l’on arrive à attirer. N’est-on alors pas encore plus soumis à la volonté des marchés ?
Marc Lefèvre : Ce qui fait la richesse d’une place c’est la diversité de ses flux et de ses investisseurs, ce n’est pas uniquement la géographie.
Luis Vaz-Pinto : La base des investisseurs institutionnels français est de très grande qualité et largement constituée de fonds «long only». Après la Grande-Bretagne, la France est la mieux servie en Europe, bien mieux servie que l’Allemagne par exemple, ou que l’Italie. On voit que dans les introductions en bourse françaises, la demande institutionnelle a été clé dans la réussite des opérations. Par exemple, dans l’opération d’Elis, les investisseurs français représentaient 35 %, pour Europcar 23 %, pour la Coface 40 %, pour Elior 32 %.
Il est vrai que pour faire monter les prix, toutes les poches de liquidité doivent être présentes pour aider à créer un sentiment d’enchères parmi les investisseurs. L’année dernière, après une sortie massive du marché européen, les Américains ont fait leur grand retour ce qui a beaucoup contribué au succès des opérations. En termes de création de demande, je pense qu’il faut faire plus pour le retail, qui souffre un peu, à la fois pour des raisons économiques et également à cause des coûts supplémentaires pour structurer une offre retail. Et ceci n’est pas le cas uniquement en France.
Marc Lefèvre : Tarkett comptait tout de même 14 % de retail ! Attirer cette classe d’investisseurs suppose un travail en amont structurant. Les PME et ETI y parviennent avec succès.
Hervé Letréguilly : Pour bien solliciter le retail, il est nécessaire de mobiliser les réseaux bancaires et de recourir à des campagnes de publicité, ce que l’on observe beaucoup moins aujourd’hui. La décision d’y recourir doit être prise en amont et implique par ailleurs un coût. La tendance est plutôt de faire un placement institutionnel qui correspond plus aux pratiques des marchés internationaux. Mais dans certaines opérations, les parties peuvent regretter de ne pas avoir sollicité davantage les particuliers.
Philippe Kubisa : Pour toucher le retail français, le fait d’être assisté d’une banque française aide beaucoup. Les opérations qui ont été structurées uniquement avec des banques étrangères ont une part retail beaucoup plus faible, et certaines ont même échoué.
Matthieu Grollemund : L’un de mes clients m’expliquait récemment que s’il voulait faire un placement retail dans deux ou trois ans, il fallait qu’il commence déjà à communiquer sur sa marque auprès du grand public.
Marc Lefèvre : C’est exactement la stratégie que Tarkett a adoptée. Ils ont commencé une campagne institutionnelle très en amont et l’ont intensifiée pendant l’opération.
Matthieu Grollemund : Les fonds ont un rôle important dans la structuration de l’opération, pour amener l’émetteur à pouvoir gérer l’IPO mais aussi tout ce qu’il y a après : la compliance, le reporting, etc. Lorsqu’un émetteur se présente tout seul sur le marché, il peut prendre un certain temps. Mais quand il y a un fonds bien rôdé, qui va éventuellement compléter l’équipe de management, le processus peut aller beaucoup plus rapidement.
Avantages de l’IPO
Matthieu Grollemund : Nous travaillons avec les grands fonds américains comme Bessemer Venture Partners, Accel ou Index qui réalisent de très nombreuses sorties par IPO de leurs participations tout en gardant une part significative du capital. De manière générale, plusieurs clients nous ont indiqué que «c’est en ne vendant pas qu’ils ont gagné le plus d’argent». IPO n’est donc pas forcément synonyme de vente rapide de leur participation. Dans le cas de Criteo, ils n’ont pas vendu leur participation avant un certain temps. A l’inverse dans Showroomprivé, les fonds ont vendu une partie importante de leurs lignes. Contrairement à ce que l’on entend parfois, une IPO initiée par un fonds n’est pas forcément le fruit d’un dual track n’ayant pas permis de trouver d’acheteur, le fonds se tournant vers la bourse comme alternative. Dans certains cas, la création de valeur est réelle après l’IPO car toute une série d’actionnaires prend le relais. Tout dépend des actifs. S’ils sont recherchés, comme dans le secteur technologique, une spirale positive s’enclenche.
Eric Schaefer : Pour un très large cap, la question du dual track ne se pose pas. Il est difficile de trouver des candidats, notamment des sponsors, compte tenu de la taille de l’opération. Si les cessions d’Europcar ou d’Elis avaient été réalisées avec des sponsors, elles auraient représenté les plus grosses opérations de l’année d’assez loin. Le marché français, depuis la crise, ne fait plus tellement d’opérations nécessitant un chèque de 1 ou 1,5 milliard d’euros pour des actifs de 2, 3 ou 4 milliards. Il y a donc un effet taille, mais également un effet marché. Effectivement, l’introduction en bourse est logique lorsque le marché est porteur, que les investisseurs américains sont présents et que l’on parvient à obtenir des valorisations que le M&A, dans le contexte actuel, est incapable de délivrer. Par ailleurs, lorsqu’une société entre en bourse, il y a un effet d’entraînement, de motivation, de publicité très fort sur le management et les collaborateurs ainsi qu’un certain sentiment de fierté qui libère beaucoup d’énergie. L’IPO permet, selon le poids de la part primaire, de lever de l’argent et de désendetter la structure afin de donner à la société la capacité de déployer du capital de façon nouvelle à un coût souvent moins élevé. Il est ainsi possible de payer des acquisitions en titres, d’obtenir des financements différents comme des crédits corporate au lieu des crédits LBO. Eurazeo a été pendant longtemps actionnaire de Rexel avant d’en sortir complètement. Depuis qu’elle est cotée, la société a pu faire l’acquisition de Hagemeyer, ce qui aurait été impossible sous LBO. De même, Elis a fait un certain nombre d’acquisitions depuis sa cotation, Europcar en fera aussi. Nous sommes donc très contents de rester au capital de ces sociétés et de les voir continuer leur développement.
Hervé Letréguilly : A côté de la possibilité pour les actionnaires de mieux vendre la société, notamment en bénéficiant de l’accroissement de valeur liée à un cours qui progresse, l’IPO permet aussi de développer certains outils. Par exemple, la faculté de payer des acquisitions en actions ou la mise en place de plans d’intéressement et d’actionnariat qui permettent de motiver les salariés sont rendues possibles grâce à la liquidité du titre.
Caroline Parot : Vu de l’intérieur, c’est également un facteur d’accélération. Sous LBO, il existe une contrainte de financement sur un certain nombre de schémas. Lorsque la société commence à avancer sur de nouveaux schémas de son equity story, l’IPO est alors vécue comme un accélérateur. La part primaire de l’IPO nous a permis de modifier complètement la structure financière et de bilan de la société et d’envisager l’accélération de la transformation. Cette accélération n’est pas seulement financière, elle stimule le management et les équipes. Pour Europcar, le management a fait des roadshows auprès des équipes pour leur expliquer ce que l’IPO impliquait et leur donner une vision de l’avenir. Nous mettrons en place un certain nombre d’instruments d’intéressement qui permettront de mobiliser l’interne. Il y a donc un double facteur : une vision stratégique d’accélération avec de la croissance et la rationalisation de la structure financière, mais également un nouveau poumon pour l’entreprise via ses salariés qui se remobilisent, car le LBO n’est pas toujours bien compris dans un certain nombre de sociétés. La sortie de LBO permet de repositionner le discours et de redonner de l’élan à la société.
Marc Lefèvre : En effet, l’IPO permet de mobiliser les collaborateurs et d’accroître la visibilité et la crédibilité du groupe.
Le choix de la place de cotation
Marc Lefèvre : Le choix de la place de cotation est essentiellement en fonction du pool de liquidité que la société veut offrir à ses investisseurs. Il se fait également en fonction des valorisations que la société obtiendra selon le marché choisi ainsi que des comparables qui se trouvent sur ces marchés. Ce sont les trois éléments centraux de la décision aux côtés bien évidemment des sujets d’activité pour la société (développement commercial, siège social…) et de présence d’un écosystème favorable (analystes….).
Hervé Letréguilly : Il y a également la qualité de la couverture des analystes.
Thomas Le Vert : Il est intéressant de noter, ces dernières semaines, le retour à Paris des sociétés technologiques qui étaient traditionnellement tournées vers le marché américain. Nous l’avions vu avec Cnova qui s’était cotée à New York mais qui a finalement demandé une cotation secondaire à Paris. Les projets d’introduction en bourse de Showroomprivé et Deezer sont à cet égard un bon exemple, ces deux sociétés ayant fait le choix d’une cotation parisienne.
Philippe Kubisa : Certes, mais ce sont deux sociétés qui restent très françaises. Elles ont très peu d’activité aux Etats-Unis. Il y a quand même un aspect business essentiel. Une société n’ira pas se coter sur une place uniquement parce qu’elle y obtiendra une meilleure valorisation, c’est une vision trop court-termiste. Elle le fera s’il y a un vrai développement opérationnel sur le marché de la place de cotation. Si L’Occitane a choisi de se coter en Asie, c’est parce que le marché asiatique était très important pour la société. Lorsque Criteo va sur le Nasdaq, c’est parce que l’essentiel de son chiffre d’affaires est réalisé aux Etats-Unis.
Matthieu Grollemund : Il est certain que les questions de prix, de liquidité, du nombre d’analystes suivant les valeurs peuvent être un handicap sur Euronext. Faut-il changer de marché pour avoir une meilleure couverture ?
Certaines sociétés qui se sont cotées en Europe vont ensuite aller chercher à se coter aux Etats-Unis, parfois en commençant par un pipe ou un cross-over, parfois directement, parfois en deux ou trois étapes. Ceci pour essayer de combler le manque de suivi, la très faible liquidité ou encore pour combler l’écart de prix avec des concurrents américains très comparables. Lorsqu’un client nous demande quelle place choisir, nous leur répondons : quel est votre métier, où est votre marché ? C’est alors que nous trouvons la place de cotation naturelle. La cotation vers un marché sur lequel l’entreprise n’a pas une part prépondérante de ses activités n’a pas de sens et devient très vite artificielle. Certaines entreprises vont parfois très vite en bourse et quelque temps après, migrent ou demandent une seconde cotation. Nous avons le cas d’une entreprise française qui a une technologie qui marche, qui est reconnue, et qui vaut un peu moins de 100 millions d’euros. Son concurrent américain, coté aux Etats-Unis, a une technologie qui marche moins bien mais qui vaut 2,5 fois son prix. Il se demande donc comment aller se coter aux Etats-Unis pour bénéficier d’une meilleure valorisation. L’important est qu’il se développe d’abord sur le marché américain pour construire une equity story. Comme l’illustre l’exemple de L’Occitane, la logique est la même sur le marché asiatique.
Seela Apaya-Gadabaya : En pratique, nous voyons moins de sociétés demandant dès le départ une double cotation. Les contraintes réglementaires sont tellement lourdes que la société se prépare dans un premier temps à s’introduire sur sa place de cotation «naturelle» et ensuite, au fil du temps, elle peut être amenée à envisager une cotation sur une deuxième place. Mais la double cotation se voit désormais très rarement sur des opérations françaises. Dans certains pays d’Europe, elle peut se pratiquer pour des raisons réglementaires. Par exemple, en Allemagne, des doubles cotations ou une cotation en Allemagne s’accompagnant d’une offre au public au Luxembourg se pratiquent parfois, car cela permet notamment d’avoir un prospectus en anglais et pas uniquement en allemand.
Luis Vaz-Pinto : La principale place de cotation pour une société semble souvent évidente, en dehors du secteur des technologies et biotechnologies. Mais il y a des phénomènes de mode. Par exemple à la fin des années 1990, de nombreuses sociétés ont voulu être cotées aux Etats-Unis pour aller chercher des investisseurs américains. Un autre exemple : les entreprises russes qui ont cherché à être cotées pour des raisons politiques en Chine. Dans de nombreux cas de sociétés européennes qui se sont cotées aux Etats-Unis, elles ont ensuite tout fait pour revenir, malgré une législation très difficile à surmonter, en arrière. Ces sociétés ont compris que les investisseurs US sont capables d’intervenir en Europe, et que les coûts, réglementaires ou autres, associés à une cotation US sont très élevés. Ce choix d’être coté hors de son marché naturel peut conduire à un phénomène que l’on appelle les «orphan stocks» (les actions orphelines), qui ne bénéficient pas de liquidité ou de couverture de recherche sur leur marché car les investisseurs s’en détournent.
Marc Lefèvre : Les entreprises françaises cotées hors de leur marché d’origine sont très peu nombreuses. Il y en a eu moins d’une douzaine en plus de 10 ans. L’exemple le plus parlant est effectivement celui de L’Occitane, qui réalise une part très importante de son chiffre d’affaires en Asie. Mais il y a aussi des sociétés qui ont fait le pari d’aller se coter aux Etats-Unis, comme Sequans Communications, et qui en ont payé le prix très lourdement.
Hervé Letréguilly : Nous observons toutefois une évolution car depuis les années 2000, nous voyions surtout des retraits de la cote de sociétés qui quittaient le marché américain. Depuis deux ans, de nombreuses sociétés y reviennent ou l’envisagent.
Marc Lefèvre : Ce mouvement concerne des secteurs bien particuliers, essentiellement les techs et biotechs.
Philippe Kubisa : Les Etats-Unis ont intelligemment manœuvré avec le Jobs Act, qui a simplifié la cotation de sociétés émergentes.
Les nouvelles règles de l’AMF
Luis Vaz-Pinto : Je pensais auparavant que la réglementation française était beaucoup trop contraignante, mais l’AMF a depuis fait un travail remarquable de consultation de la place pour mettre le marché français à niveau. Qu’il soit aujourd’hui possible d’avoir pour une transaction française un prospectus en anglais et de le résumer en français est la preuve que les esprits ont beaucoup évolué ! Un autre exemple : en France, il était beaucoup plus difficile que dans les autres pays européens de réaliser des IPO dans des périodes volatiles. Ceci était lié aux contraintes de fourchettes de prix qui étaient limitées dans le temps à 15 % puis revues à 20 % puis maintenant à 30 %. Or dans un marché volatile, une manière de réconcilier les demandes des investisseurs et celles des vendeurs en faisant avancer la transaction est justement d’élargir cette fourchette.
Hervé Letréguilly : Il est intéressant de rappeler que les règles en vigueur de l’AMF, qui dataient des années 2000, étaient dictées par la protection des investisseurs particuliers, dans un contexte d’opérations donnant lieu à des hausses de cours importantes dès la première cotation dont ils ne bénéficiaient pas toujours. Nous ne sommes plus dans ce schéma. Il est heureux que l’AMF ait assoupli les règles, notamment celles permettant de tenir des réunions d’analystes avant la publication du document de base. Cette évolution est très positive car nous sommes désormais alignés sur les autres pays européens (ainsi que sur d’autres pays tels que les Etats-Unis) qui ne connaissent pas ces contraintes.
Thomas Le Vert : L’utilité d’une réforme se mesure au succès qu’elle a rencontré. Nous constatons que la quasi-totalité des émetteurs a fait le choix d’utiliser les nouvelles possibilités offertes, qu’il s’agisse de Deezer ou Oberthur avec un prospectus en langue anglaise ou d’Elis, où nous avions eu recours au mécanisme de fourchette de prix élargie. Toutes les dispositions prises par l’AMF ont été utilisées partiellement ou totalement par les émetteurs, ce qui démontre qu’il y avait un réel besoin de s’aligner sur la pratique internationale. Pour Spie, grâce à la possibilité d’avoir une présentation confidentielle aux analystes du syndicat, il s’est déroulé moins d’un mois entre l’enregistrement du document de base et la clôture de l’opération, ce qui était très utile dans un marché difficile (à comparer à un calendrier usuel de près de sept semaines en France pour une telle opération).
Seela Apaya-Gadabaya : L’obligation d’effectuer une offre destinée aux particuliers, dite offre «retail» dans le cadre des introductions en bourse en France représente une contrainte qui peut s’avérer lourde lorsque les marchés sont fébriles. En effet, techniquement, l’offre retail doit durer au moins six jours de négociation dans la mesure où le prospectus d’introduction en bourse doit être publié six jours avant la clôture de l’offre au public. De ce fait, quand un book est couvert par les investisseurs institutionnels bien avant, on ne peut pas en réalité le sécuriser, et en période de volatilité des marchés, les ordres peuvent être retirés du book par les investisseurs institutionnels durant le délai pendant lequel l’offre retail suit son cours. Nous avons eu des discussions sur ces sujets de calendrier avec l’AMF qui n’a pas été fermée à la discussion. Il faudrait pouvoir se ménager la possibilité, lors d’une introduction en bourse que l’on relance après un premier échec, de faire deux règlements-livraisons afin de sécuriser d’abord le placement institutionnel, puis clôturer l’offre retail sur la base d’un prix définitivement fixé.
Hervé Letréguilly : C’est effectivement une réflexion que nous avons initiée pour permettre de relancer une opération qui a subi un premier échec : l’idée est de partir du book existant pour réaliser le placement institutionnel en un temps très bref, dès que les conditions de marché le permettent, afin de sécuriser l’opération, puis de l’ouvrir le temps nécessaire (trois jours) au public. Ce dispositif aurait vocation à s’appliquer aux opérations reportées, ainsi que nous l’avons précisé à l’AMF ; il est très pertinent dans un contexte de forte volatilité, et pourrait permettre de sauver des opérations. L’AMF était réceptive.
Perspectives
Thomas Le Vert : Un certain nombre d’opérations sont annoncées pour la fin de l’année, avec notamment la cotation d’Amundi. Il est essentiel que ces opérations se passent bien pour donner de l’élan à l’année 2016. Nous nous attendons à ce que des sociétés de taille moindre se présentent pour une introduction en bourse ; à cet égard, nous attendons notamment une seconde vague de mises en bourse de participations de fonds pour l’année 2016 si les conditions de marché le permettent.
Marc Lefèvre : Les montants levés par les IPO en 2014 avaient représenté la somme exacte des six années précédentes cumulées. En cette fin d’année 2015, nous verrons si les opérations à venir se déroulent bien et permettront ainsi de dépasser les levées de 2014, ce qui devrait être le cas. Pour 2016, nous sommes plutôt optimistes car le M&A sera actif, il y aura des spin-offs intéressants, puis les sorties de fonds dont nous avons parlé. Ce seront des tailles d’opérations diverses, mais nous devrions avoir une belle année 2016 avec également des deals cross border intéressants.