Points d’attention dans les processus de cession actuels
Malgré la crise, le marché du private equity a redémarré de manière très dynamique. Dans ce contexte, les négociations des management packages sont guidées à la fois par la volonté d’une protection financière renforcée des managers investisseurs et par un resserrement des populations de cadres investissant à risque dans l’opération aux côtés du fonds actionnaire.
La protection financière renforcée se traduit par une attention plus importante à la négociation du bas de la courbe de rétrocession avec un examen attentif des situations susceptibles de provoquer un atterrissage des résultats un peu inférieur à ceux prévus dans le business plan. L’objectif est de s’assurer que le management package ne comporte pas d’éléments déclencheurs d’effet trop binaire. Une telle situation se caractérise par exemple par un effet « sweet equity » trop fort, associé à une rémunération élevée des prêts ou bien encore via une grille de rétrocession des instruments « ratchets » dont le déclenchement se situe à proximité de l’atterrissage du business plan. Dans un tel contexte, pour peu que le management ait investi exclusivement dans cet outil très binaire, le profil d’investissement du management devient trop fortement risqué. Si le management a en plus recours à un emprunt pour financer ces outils, cela peut se révéler désastreux.
Devant l’incertitude économique et malgré la tendance passée à l’implication toujours plus grande de cadres de l’entreprise investis directement dans l’opération de LBO, nombre de dirigeants freinent l’accès au capital aux larges populations préférant le restreindre à un petit nombre de cadres pleinement conscients des enjeux et des risques financiers inhérents à l’opération. Une tendance à l’utilisation d’outils gratuits est constatée pour les populations plus larges afin d’éviter la situation de cadres pouvant perdre leur investissement et les conséquences managériales inévitables qui y sont liées. La conscience du dirigeant de sa responsabilité morale mais également juridique à cet égard est plus grande.
Les aménagements apportés aux management packages existants
Passée la phase critique, le management procède avec ses actionnaires à une remise à plat des objectifs du business plan. Ce « reset » fait directement prendre conscience au management des impacts de la crise sur son propre management package et consécutivement sur la valeur des instruments dans lesquels il a parfois investi des sommes importantes.
Le principe du management package étant de maintenir un alignement des intérêts du fonds et du management, la crise actuelle, par sa nature exogène et brutale, vient mettre à mal cet alignement d’intérêts. La raison principale est que les outils permettant usuellement de concéder au management une rétrocession sont par construction plus risqués que ceux souscrits par le fonds d’investissement. Dans l’hypothèse de la révision d’un business plan à la baisse, les seuils de déclenchement de la rétrocession ne sont plus calés sur l’atteinte des nouveaux objectifs de performance, ce qui est source de crispation. Une discussion s’ouvre alors de telle sorte à s’assurer du réalignement d’intérêts et de la motivation des équipes à aller atteindre ces nouveaux objectifs collectifs.
Les nouvelles projections de résultats rebattent les cartes du management package différemment selon les situations. Le premier impact peut être que l’atteinte des niveaux de TRI et/ou multiple initialement attendus pour l’opération est simplement décalée dans le temps. Dans ce contexte, un simple aménagement ou une suspension des conditions d’exercice des promesses de vente exerçables en cas de départ peut suffire à rendre de la sérénité à l’équipe de management qui escompte retrouver dans le temps une performance équivalente de ses instruments. Les nouvelles projections de résultat peuvent avoir un impact bien plus important sur la rétrocession s’il s’avère que les espérances de TRI et/ou multiple d’equity doivent être largement revues à la baisse et que les instruments souscrits par l’équipe de management n’ont plus que marginalement de chances de se déclencher. Dans ces conditions, s’ouvre une discussion entre le management et son actionnaire, qui diffère sensiblement selon les rapports de force en présence et la légitimité passée de l’équipe de management, pour tenter d’aménager les critères déclencheurs du management package. L’approche est complexe sur le plan technique car la mise en œuvre juridique du nouvel accord est de nature à générer de nombreuses problématiques fiscales que seule une approche transversale permet de résoudre. Une autre façon d’atteindre l’objectif est d’émettre un nouvel instrument, de type actions gratuites ou bien très faiblement valorisé, permettant de rattraper le décalage et réaligner les intérêts.
La nécessité toujours plus grande d’avoir recours à des experts
Dans ses discussions avec ses partenaires financiers, le management a systématiquement face à lui des experts du private equity. Il faut qu’il puisse avoir une approche éclairée des enjeux le concernant et des pratiques des acteurs en présence. Cette nécessité est encore plus aiguë en temps de crise. Que ce soit pour lui ou pour ses équipes, le dirigeant a besoin de prendre la mesure exacte des enjeux financiers, juridiques et fiscaux dans l’environnement économique actuel. La nécessité de recourir également à des valorisateurs experts de ces instruments est d’autant plus cruciale que, dans de tels contextes de crise, la prise en compte des risques économiques et la valorisation des instruments entraînent des risques fiscaux à ne pas négliger.
Questions à… Claire Revol-Renié et Adrien Badelon, associés, Scotto Partners
Quelles sont, selon vous, les problématiques actuelles du marché ?
Deux tendances actuelles se dégagent. Le marché du private equity est d’abord largement dynamisé par l’abondance de liquidités, ce qui engendre une augmentation de la concurrence dans les processus de cession et consécutivement plus de ventes conclues à l’issue d’offres préemptives très généreuses. Ceci est d’autant plus vrai pour les cibles n’ayant été que peu ou pas impactées par la crise. A l’inverse, certaines autres transactions ont vu leur planning de cession être reporté, voire annulé. D’autres groupes se sont retrouvés avec des difficultés financières ou font déjà l’objet de discussions avec leurs créanciers. L’environnement est très mouvant et les équipes de management que nous assistons sont plus sollicitées que jamais, qu’il s’agisse des processus accélérés de rotation d’actionnaires ou bien des restructurations de dettes. Dans un tel contexte, s’il reste toujours plus central dans ces opérations, le management demeure le point de pivot entre acquéreur et vendeur, devant constamment composer avec la loyauté nécessaire à son actionnaire vendeur tout en préservant ses intérêts et ceux de son groupe dans les discussions avec son prochain acquéreur dont il ne maîtrise généralement ni le choix, ni le prix d’acquisition. C’est une partition plus délicate que jamais à jouer face à la tentation d’une envolée des multiples de sortie associée à des leviers d’endettement toujours élevés dans un contexte économique encore incertain.
Quelles sont les particularités de votre équipe dédiée à ces dossiers et comment accompagnez-vous vos clients ?
Notre équipe est pluridisciplinaire et associe à une vision stratégique et globale de l’opération, l’intervention d’experts qu’il s’agisse de la négociation contractuelle des opérations, de la structuration fiscale des management packages ou des aspects juridiques de gouvernance. Nous intégrons également une équipe de droit social dédiée notamment aux problématiques de rémunération des dirigeants.
Ceci nous permet d’assister les managers et dirigeants en conservant une approche large intégrant stratégie et négociation tout en leur faisant bénéficier d’expertises techniques pointues pour résoudre les problématiques juridiques, fiscales et sociales de plus en plus complexes auxquelles ils sont confrontés.
Nous accompagnons les personnes physiques, entrepreneurs, fondateurs, actionnaires familiaux et dirigeants, ainsi que leurs groupes, tant en France qu’à l’international, et notre cabinet occupe depuis plus de 25 ans une position de précurseur et leader, en matière de négociation et de structuration des management packages, dans les opérations de LBO. Nous sommes particulièrement reconnus pour notre indépendance vis-à-vis des investisseurs financiers. Notre force est d’assister nos clients très en amont des opérations afin de leur faire prendre conscience des enjeux, de leur positionnement très spécifique dans ces opérations et de les aider à optimiser leurs intérêts et ceux de leur groupe en réduisant l’asymétrie naturelle entre eux et les experts du private equity que sont leurs actionnaires. Notre position de leader s’appuie en particulier sur une parfaite compréhension des mécanismes contractuels et financiers à l’œuvre dans ces opérations, et sur des benchmarks sans équivalent en matière de management packages, un des éléments clé que nos clients viennent chercher. Cette valeur ajoutée nous permet de proposer une stratégie de négociation ambitieuse et sur mesure à nos clients.