Parole d’expert

Les clés d’une due diligence réussie sur le segment des PME et ETI

Publié le 24 octobre 2025 à 10h00

PwC    Temps de lecture 5 minutes

Avec environ 6 800 ETI et près de 160 000 PME en France, le terrain de jeu des investisseurs small et mid-cap est considérable. Toutefois, pour mener à bien une opération M&A sur le segment des PME et ETI, il faut avoir les bonnes clés.

Par Louis Terrier, associé PwC Deals Private & Family

Dans un contexte où l’accès à la donnée explose et où les outils d’analyse sont toujours plus nombreux, sophistiqués et incontournables, il est tentant de se dire qu’effectuer une due diligence sur une cible de petite taille est à la portée de chacun. Toutefois, contrairement aux grands groupes, les PME disposent rarement de systèmes d’information structurés ou de reportings consolidés. Les données à analyser sont souvent brutes, non réconciliées et hétérogènes. L’un des enjeux majeurs des deal advisors est de parvenir à les collecter, à les fiabiliser et à en extraire des analyses pertinentes. Ce travail, chronophage mais indispensable, exige rigueur, capacité d’adaptation et maîtrise des outils technologiques et d’analyse de données. Il se heurte toutefois à la réalité des entreprises cibles. Il s’agit alors de transformer l’information brute en un socle suffisamment fiable et exploitable pour éclairer la prise de décision et rassurer investisseurs ou acquéreurs potentiels.

Autre écueil auquel sont confrontés les « VDDistes » : les processus de cession sur ce segment de marché sont fréquemment marqués par des temps longs, des processus saccadés (avec des phases de « stop-and-go ») et une certaine imprévisibilité. Mutualiser les ressources, anticiper les pics d’activité et rester mobilisé sur la durée sont autant de compétences à cultiver. Une gestion agile du planning permet aux conseils de garantir une continuité de service et d’assurer la fluidité des échanges, même dans des contextes mouvants.

Ensuite, les missions de due diligence sur les segments small et mid-cap s’effectuent souvent dans un cadre budgétaire contraint. La capacité à ajuster le périmètre d’intervention, à se concentrer sur les points clés pour les investisseurs et à proposer des modalités tarifaires adaptées au marché devient alors un atout décisif et différenciant. Il faut adapter la démarche au budget et pas l’inverse ; c’est ce qu’on appelle le « design to cost ». Il impose de privilégier l’essentiel, d’optimiser et de concevoir des livrables sur mesure, alignés avec les attentes et enjeux spécifiques de chaque opération. En d’autres termes, faire ce qu’il est pertinent de faire (ni trop, ni trop peu).

Le rôle des conseils sur ce segment de marché est particulièrement accru lors des sessions de questions-réponses, auxquelles les équipes de direction sont rarement confrontées habituellement. Souvent sous-staffées, elles ne peuvent pas facilement anticiper les interrogations des contreparties, n’ont pas toujours la « bande passante » pour bien identifier en détail les leviers de performance ou travailler et clarifier les messages clés. Le fait d’être en première ligne à ce stade des processus permet de soulager des équipes dirigeantes, déjà très sollicitées par des processus longs et intenses, et d’assurer une communication claire, cohérente et efficace, tout en utilisant le même langage que les contreparties.

Les opérations de M&A autour des PME et ETI, ce sont aussi bien souvent des opérations transfrontalières. La réussite de ces deals cross-border repose sur la capacité des conseils à s’appuyer sur un réseau international de professionnels expérimentés, maîtrisant à la fois les enjeux et les standards idoines, ce que les équipes dirigeantes n’ont pas toujours la possibilité de faire. En effet, cela implique de mobiliser des experts techniques compétents, de dialoguer en anglais et de comprendre les spécificités culturelles et réglementaires de chaque marché, ce qui n’est pas toujours facile pour une PME. Ainsi, la dimension internationale des cabinets de conseil en transaction, couplée à une expertise sectorielle, est un facteur clé de valeur ajoutée apportée aux clients et sécurise les opérations même les plus complexes.

Enfin et surtout, les conseils doivent être là pour accompagner les dirigeants ; et le plus souvent, leurs meilleurs outils sont la pédagogie et l’empathie. Les dirigeants de PME et ETI – souvent fondateurs ou actionnaires familiaux – abordent la due diligence avec appréhension. Leur attachement à l’entreprise, fruit de toute une vie, peut rendre les échanges sensibles. Il est alors crucial d’adopter une approche pédagogique, d’expliquer la finalité de chaque demande, de valoriser la complémentarité entre le conseil en transaction (auteur de la due diligence) et le banquier d’affaires (organisateur du process de cession et auteur, entre autres, de l’Information Memorandum), et de rassurer sur la démarche. L’écoute, l’empathie et la capacité à vulgariser les enjeux sont déterminantes pour instaurer la confiance et faciliter la collaboration.

Ainsi, mener une due diligence réussie sur une PME ou une ETI, c’est conjuguer savoir-faire technique, agilité organisationnelle et intelligence relationnelle. La maîtrise de la donnée brute, la gestion des process longs, l’adaptation budgétaire, l’accompagnement des dirigeants et la mobilisation d’un réseau international sont autant de leviers pour offrir un service à forte valeur ajoutée et permettre le succès des opérations. 

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